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L'Histoire du château

Le château de Saint-Blaise

 

Saint-Blaise, se situe entre Aspremont et Levens à 320 m d’altitude, dominé par les monts Cima (878 m) et Inarte (801m). Le terroir de Saint-Blaise a été habité dès la préhistoire. Des archéologues y ont trouvé des traces de deux camps celto-ligures pouvant remonter au Ve siècle avant J.C. Un fer de lance préhistorique, remarquable par ses dimensions et son poids de 3,670 kg y a été retrouvé également.

 

Le château se trouve sur une éminence d’un contrefort du mont Cima à 550 m d’altitude, situé entre le vallon de l’Amandier et le ravin de Fonta-Cabra qui sont les deux accès partant de la RM 14 pour y accéder, après un dénivelé de 190 m. Arrivé sur le site, on est surpris par l’importance des ruines relativement bien conservées (logis, créneaux, donjon, barbacane).

 

Paul CANESTRIER, historien, né à Levens, nous raconte qu’au début du XIe siècle, les forêts touffues et giboyeuses qui couvraient les pentes du mont Cima étaient d’excellents terrains de chasse pour les gentilshommes. Le vicomte Laugier de Nice, deuxième époux de Dame Odile, fille de Guillaume de Provence dit Le Libérateur, séduit par l’abondance du gibier, aurait fait bâtir en 1026, sur ces lieux dont il était propriétaire, un castel au milieu des bois pour servir de pavillon de chasse (sans doute château de motte comme il s’en faisait à cette époque). Une tour fut édifiée et, paraît-il, Villa Sancti Blasii devint un lieu de chasse à la mode avec des chenils et des hôtelleries.

 

En 1028, les vicomtes (gouverneurs) de Nice, cédèrent le terroir de Saint-Blaise à l’abbaye bénédictine de Saint-Pons qui y fonda vers 1030 un prieuré. Dès lors, jusqu’en 1792 ce terroir fit partie de la mense de l’abbaye. Les abbés deviennent les seigneurs de Saint-Blaise.

 

Au XIIIe siècle (de 1227 à 1235), Raymond Bérenger V entreprit la conquête des fiefs rebelles.

Son lieutenant, Romée de Villeneuve, conduisit des campagnes rapides et décisives à l’est du Var, et mis en place un réseau castral. Des châteaux furent construits pour surveiller les nouveaux territoires annexés. « Castrum Sancto Blasio Â» apparaît alors dans les actes. Le château de Saint-Blaise naît dans ce contexte de guerres vers 1229-1230.

Au début du XIIIe siècle, l’abbé de Saint-Pons concéda le fief à Raymond Chabaud, membre d’une riche famille niçoise.

En 1240, il achètera le fief d’Aspremont. En tant que seigneur, il interviendra en 1252 pour procéder à la délimitation entre Saint-Blaise et Levens.

 

C’est Charles Ier, fils du roi de France, frère cadet de Saint-Louis, qui avait demandé de trancher en 1251 sur les litiges entre les fiefs des villages des diocèses de Nice et de Vence.

Le 14 mars 1262, est rédigé un compromis entre l’Abbé de Saint-Pons et Raymond Chabaud, au sujet des services que celui-ci devait payer à l’abbaye pour le château. A la fin de la concession en 1262, quand l’Abbé de Saint-Pons, Guillaume de Berre, voudra reprendre son fief, Raymond Chabaud ne le rétrocèdera qu’après de longs démêlés juridiques prétendant avoir engagé de grosses dépenses pour sa restauration.

 

Une sentence du 25 mai 1262, le condamne à restituer le fief et le château à l’Abbé. Toutefois, l’arbitre ayant constaté la réalité des grosses dépenses faites par Raymond Chabaud, oblige l’Abbé à lui payer la somme demandée.

 

En 1269, Guillaume de Berre assisté des moines seigneurs de Saint-Blaise, délimitent les terroirs de Saint-Blaise et d’Aspremont. Le château est restauré. Au milieu du XIVème siècle, d’autres travaux changeront son aspect. Le logis et l’enceinte cernant la cour sont reconstruits et une barbacane précède alors le donjon.

 

On trouve dans le Chartrier de Saint-Pons divers actes signés ou affichés au château. En voici quelques-uns :

  • « le 27 janvier 1312, confirmation pour exécution de la condamnation, prononcée par les juges du château de Saint-Blaise, contre certains hommes de Levens qui ont volé quatre moutons sur le territoire de Saint-Blaise.

 

  • Le 14 avril 1333, publication par le notaire de la cour de Saint-Blaise de la condamnation prononcée par le juge du château pour vol d’une vache.

Sentence : restitution de la vache et 10 livres d’amende.

 

  • le 19 novembre 1338, dans la forteresse est affiché un extrait d’un jugement criminel prononcé en 1331 pour prouver que la juridiction de Saint-Blaise s’étendait sur Falicon. Â»

 

Le 6 mars 1365, les habitants viennent rendre hommage et fidélité au nouvel Abbé, Laurent de Berre. Il fait ensuite un inventaire des salles du château :

- Peu d’armes : 3 boucliers et 3 arbalètes.

- Des ustensiles de cuisine pratiquement inexistants et en mauvais état

- Des meubles et du linge : dans la chambre blanche, un coffre, un escabeau, un paravent autour du lit, une couverture avec des peaux de lapins. Dans la chambre de la tour, un lit avec paillasse et matelas. Des provisions : 25 setiers de figues sèches (10 hl) et 260 setiers de blé (105 hl).

- Des outils : une petite hache, une tarière, un ciseau de menuisier 

- Des instruments de justice : 4 chaînes, 2 pour les mains, 2 pour les jambes, une entrave.

 

En 1388, quand le Comté de Nice se donne à la Savoie, le château n’est plus mentionné. Les crises qui ont sévi au cours du XIVème siècle ont entraîné partout un sévère dépeuplement : les pestes en 1348, 1361, 1371, 1405 ; les famines généralisées en 1323, 1329, 1332, 1364, les guerres et enfin en 1382, un tremblement de terre. En 1461, un acte notarié dit Saint-Blaise inhabité.

 

La vie ne reviendra qu’en 1607 quand le territoire sera découpé par Monseigneur Louis Grimaldi de Beuil en une trentaine de lots qui seront donnés en emphytéoses[1].

 

Pendant tout ce temps, le château est déserté mais n’est pas détruit. Le Chartrier de Saint-Pons indique l’acte d’hommage et de fidélité prêté au Duc Charles Emmanuel de Savoie par l’Abbé Honoré Martelli Le 7 avril 1582. Un siècle plus tard, un acte du 19 juillet 1692 indique que l’Abbé Gioffredo permet à André Ollivier de Nice de construire une petite maison « pour s’y réfugier Â» avec sa famille en l’appuyant contre le château.

 

Aujourd’hui, bien qu’encore imposantes, les ruines ont bien diminué comparées à celles que l’on pouvait voir encore sur des cartes postales du milieu du 20e siècle. En 2008, constatant la menace d’effondrement de la tour, la mairie de Saint-Blaise a acheté ces vestiges à leur propriétaire afin que ce précieux patrimoine jugé par Jean-Claude Poteur[2] « exceptionnel par sa conservation et l’ancienneté de l’architecture Â» ne disparaisse. En 2011, une « Association pour la sauvegarde du château de Saint-Blaise Â» s’est créée afin que ces vieilles pierres portant la mémoire d’un Moyen Age, ô combien tourmenté, puissent revivre.

 

 

 

[1] L'emphytéose" ou " bail emphytéotique" est une convention de bail faite pour une durée de plus de dix- huit ans portant sur une terre rurale. La caractéristique de l'emphytéose réside dans le fait qu'en compensation d'une redevance très modeste, sans qu'il ait à indemniser le locataire, le bailleur devient propriétaire en fin de contrat, des améliorations et des constructions que le locataire a faites pendant la durée du bail.

 

[2] Chercheur en archéologie et histoire des paysages et des peuplements pour le Conseil Départemental des Alpes Maritimes.

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